Lorsqu'on laisse pénétrer abondamment l'odeur des fleurs de cerisiers au travers tout notre corps, avec le tremblement subtil et tiède du vent de mai, caressant le corps tout entier, tendrement, alors je vous jure... jamais rien de grave ne peut alors arriver. Quel merveilleux bonheur...
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Petit Jean de l'invisible, 10 ans déjà...
-Maman, maman, viens voir, il y a des oiseaux qui veulent entrer dans la maison!
-Mais voyons c'est impossible!
- Je te le dis maman, viens voir!!!
Je n'arrivais pas à le croire. Ils étaient bien là, deux chardonnerets jaunes qui insistaient désespérément pour entrer dans la maison, claquant inlassablement leur bec à la fenêtre du salon...
Me revient alors en mémoire le message d'espoir que j'avais envoyé à Marijo, la fille de Petit-Jean, alors qu'elle souffrait de voir son père dépérir.
- Regarde ce chardonneret, il se trouve à la croisée des chemins, signe que quelque chose de nouveau se présentera à toi.
Le matin de la visite des oiseaux, Petit-Jean était mort depuis la veille. Les chardonnerets ne m'ont pas quitté jusqu'à ce qu'il fut enterré. Ils venaient même à la fenêtre arrière de ma cuisine, insistants et déterminés à vouloir entrer. Quelque chose de surnaturel se produisait. De les observer ainsi, ils m'apparaissaient presqu'humains. Mais, que voulaient-ils bien me dire...
Petit-Jean, le frère de papa, un aide inespéré, toujours présent, aidant, pour maman et nous tous lorsque papa était en psychose. Petit-Jean que j'ai veillé presque jusqu'à la fin, sur son lit d'hôpital. Çà me faisait plaisir de le faire pour lui, il en a tant fait pour nous, et le temps s'est arrêté. J'ai pu observer l'énorme courage d'un homme qui a voulu en finir avec la vie, a raté sa sortie, pour ensuite tenir tête à tout le monde. Il fallait simplement respecter sa volonté, je fus sa complice. Petit-Jean, après un suicide raté, un diabète avancé, une gangrène à la jambe lui occasionnant d'atroces souffrances, a refusé l'amputation car il voulait vraiment mourir...
Cela ne pouvait plus continuer. Devant ses cries abominables, j'appelai l'infirmière.
- Écoutez, il faut augmenter la dose, çà ne fait plus d'effet, il souffre beaucoup trop!
- Mais si on lui donne une médication plus forte, çà va accélérer la fin.
Décidément, elle ne comprenait rien, alors j'insistai:
- ÉCOUTEZ, IL N'A PAS DEMANDÉ DE SOUFFRIR, IL A JUSTE VOULU MOURIR!
S.V. P AUGMENTEZ LA DOSE!!!
S.V. P AUGMENTEZ LA DOSE!!!
Il mourut dans les 24 heures. Il faisait très beau. Un 20 mai, c'était bien ciblé pour un fervent souverainiste, et les cerisiers étaient en fleurs, avez-vous déjà senti? Magnifique...
Lorsque le mois de mai revient, Petit-Jean revit à travers la senteur subtile et douce des fleurs de cerisier...