Givrée par cette chaleur d'été qui n'en finit plus, en cet automne naissant, après une bonne baignade, mon corps désirait croupir et n'avait d'yeux que pour ce banc de balançoire douillet, confortable et invitant. Étendue, les bras en croix, avec mon petit coussin préféré, je m'enveloppai un peu de ma serviette humide, cherchant à jongler vers la position la plus confortable, avec le pied qui n'oublie pas de bercer.
Surprise par une subtile brise effleurant mon visage, je me laissai emporter par la lourdeur envahissante de mon corps. Laisse-toi faire là, laisse-toi donc aller…Vous savez, cet paix divine que l'on reconnait lorsqu'on s'assoupit par un après-midi un peu frisquet, encore teinté d'un léger relent de soleil chaud?
Les songes d'un après-midi d'été s'éternisent tout en sensualité. Ah, ce doux bonheur... Clip... Clap... Clip... Clap... La balançoire... Vient ma douce, sécurité absolue en ce moment unique et magique. Clip... Clap... Clip... Clap... Et Tic...Tac...
Tiens donc, ça pourrait fort bien devenir le mouvement régulier et si apaisant de l'horloge, je n'en serais pas moins heureuse. Je l'entends, l'horloge qui sonnait à chaque heure chez mon grand-père que j'aimais tant, celle placée sur le vieux piano. Et sa voix résonnait, si belle... Ding... Dong... Ding... Dong...
Tic... Tac... Tic... Tac...
Et la voix de mon réveil-matin que je déposais sur le bureau, dans ma petite chambre qui sentait si bon, lors de mes retraites à la Maison des Jésuites... Mon bon Père Laramée... Où êtes-vous...
Tout a disparu , mais, mais et mais, la voici la mémoire du coeur ou rien ne se perd et tout revit, l'instant d'un sourire reconnaissant envers tout, envers la vie.
Et voilà que je me berce avec toi, si tendre et rempli d’amour, cette quiétude de tous les instants, c'est une certitude, je le sens, mon ange...
À présent, les petites pommes qui tombent sur la toile. Toc... toc... Ce pommier que je regarde du coin de l'oeil, tellement froid et nu dans l’hiver et si vivant de tout, là. J'observe les fruits denses. Ô miracle. N'y a-t-il pas lieu en cet instant de s'émerveiller et dire simplement merci la vie?
Mon esprit s’étourdit. Suis-je devant ou derrière, vers l'avant ou l’arrière de ce banc qui me supporte si amoureusement? Je me perds, je ne sais plus rien, ne pense plus, quelle douce ivresse.
De mes bras lourds de fer, mon corps pénètre la terre. Le voici, l'abandon.